Les vues d’optique, très en vogue dans la seconde moitié du 18e siècle, ont conquis un large public. Le premier procédé photographique appelé héliographie (« écriture par le soleil » en grec) est inventé par Nicéphore Niépce vers 1824. Il utilise le principe de chambre noire (ou camera obscura), connu depuis l’Antiquité : dans une boîte fermée, on perce une petite ouverture (sténopé) pour faire pénétrer la lumière du jour. Une image se projette alors à l’envers au fond de la boîte, où se trouve une plaque de métal enduite de bitume de Judée, qui durcit à la lumière. Le temps de pose doit durer plusieurs heures. En parallèle, Niépce à cherche utiliser ce procédé pour la reproduction d’images et de gravures.
Le mot photographie, « écriture par la lumière » apparaît à partir des années 1830. En 1829, Niépce associe Louis Daguerre à ses recherches mais meurt en 1833. Daguerre continue seul les travaux et donne son nom, en 1838, au daguerréotype, premier procédé comportant une étape de développement. Une plaque d’argent recouverte d’une fine couche d’iodure d’argent est placée dans la chambre noire puis exposée à des vapeurs de mercure qui provoquent l’apparition de l’image latente. Le temps de pose ne dépasse pas 30 minutes. L’image est fixée par immersion dans l’eau salée.
Nicéphore Nièpce, Cardinal d’Amboise, 1824, héliographie, Lille, Musée d’Histoire Naturelle (à gauche) ;
Louis Désiré Blanquart-Évrard, Vue de l’ancien palais de justice de Lille, après 1840, daguerréotype, Lille, Musée d’Histoire Naturelle (à droite)
En France, cette invention est parfois mal accueillie, surtout par les peintres qui y voient une menace pour
leur art. Le caricaturiste Honoré Daumier n’hésite pas à se moquer des photographes les plus célèbres et de leurs clients. Charles Baudelaire y voit la manifestation du narcissisme de la société moderne : «La société immonde s’est précipitée comme un seul Narcisse pour contempler son image banale sur le métal». Aucun doute, il aurait détesté les selfies !

François Joseph Édouard de Campigneulles, Vue du temple d’Amon, Égypte, 1858, calotype (négatif), Lille, Musée d’Histoire Naturelle
En 1841, William Henry Fox Talbot brevète le calotype (« belle image » en grec), premier procédé négatif/positif qui permet la multiplication d’une même image. Abel Niépce de Saint Victor découvre en 1847 le moyen de remplacer le papier par du verre, ce qui améliore la transparence du calotype. Pour que le bromure d’argent puisse adhérer au verre, il a l’idée de le mélanger à de l’albumine (blanc d’oeuf). Les images deviennent alors plus précises, obligeant les opticiens à réaliser des objectifs encore plus performants.

Louis Ducos Du Hauron, Campagne d’Agen, 1877, Lille, Musée d’Histoire Naturelle. © ACMNPDC / Dominique Coulier
Les premières tentatives de reproduction des couleurs sont à l’initiative d’Edmond Becquerel en 1848, puis d’Abel Niépce de Saint-Victor en 1851, qui montrent qu’une plaque d’argent recouverte de chlorure d’argent pur reproduit directement les couleurs mais de manière instable. En 1861, James Clerk Maxwell réalise la première photographie couleur en utilisant son principe de décomposition de la lumière élaboré en 1855. Il réalise trois photos d’un même sujet au travers de filtres, respectivement, rouge, bleu et jaune. En superposant exactement les trois images positives, il obtient la restitution des couleurs. Cependant, ce premier essai n’est pas très convaincant : les couches sont très mal équilibrées et ont une sensibilité différente. En 1869, Louis Ducos du Hauron réussit à Agen la première photographie en couleurs «stable» en réutilisant le procédé de Maxwell.
En 1903, les frères Lumière mettent au point un procédé de restitution photographique appelé autochrome.
Aude Dobrakowski